Dépôt de bilan d'une société

Le dépôt de bilan intervient lorsqu'une société ne peut plus faire face à ses dépenses d'exploitation.

Qu'est-ce que le dépôt de bilan ?

Dans le langage courant, l'expression "dépôt de bilan" désigne la déclaration de cessation des paiements d'une entreprise auprès du tribunal compétent. Bien que cette expression soit couramment utilisée, elle ne correspond pas à une terminologie juridique précise. Le terme exact est "déclaration de cessation des paiements", qui peut conduire soit à un redressement judiciaire, soit à une liquidation judiciaire.

Le dépôt de bilan intervient lorsqu'une société se trouve dans l'impossibilité de faire face à ses dépenses d'exploitation avec ses ressources disponibles. Cette situation marque un tournant décisif dans la vie de l'entreprise et nécessite une réaction rapide et appropriée de la part du dirigeant.

Les conditions légales du dépôt de bilan

Le dépôt de bilan est encadré par des conditions légales précises définies par l'article L 640-1 du Code de commerce. Ces conditions déterminent à quel moment la liquidation judiciaire peut ou doit être prononcée.

La cessation des paiements

La première condition est l'existence d'un état de cessation des paiements. Comme pour le redressement judiciaire, la cessation des paiements se définit comme l'impossibilité pour l'entreprise de faire face au passif exigible avec son actif disponible.

Cette situation s'apprécie de manière objective et instantanée. Il ne s'agit pas d'une simple difficulté passagère de trésorerie, mais d'une impossibilité structurelle de faire face aux échéances.

L'impossibilité de redressement

La seconde condition, spécifique à la liquidation judiciaire, est l'impossibilité manifeste de redresser la situation de l'entreprise. Le tribunal doit constater que :

  • Le redressement de l'entreprise est manifestement impossible
  • L'activité a cessé ou la cessation est inévitable à très court terme
  • Aucun plan de continuation ne peut être envisagé de manière réaliste
  • Une cession totale de l'entreprise n'est pas envisageable
"La liquidation judiciaire est destinée à mettre fin à l'activité de l'entreprise ou à réaliser le patrimoine du débiteur par une cession globale ou séparée de ses droits et de ses biens."
Article L. 640-1 du Code de commerce

⚖️ Conditions cumulatives de la liquidation judiciaire

  1. État de cessation des paiements constaté
  2. Impossibilité manifeste de redressement
  3. Absence de perspective de continuation viable

La procédure de dépôt de bilan

La procédure de dépôt de bilan suit un cheminement précis qui doit être respecté scrupuleusement pour éviter des sanctions personnelles au dirigeant.

Étape 1 : Consultation d'un avocat spécialisé

Avant toute démarche, il est impératif de consulter un avocat spécialisé en droit des entreprises en difficulté. Cette consultation permettra de :

  • Vérifier que la situation justifie effectivement un dépôt de bilan
  • Confirmer l'impossibilité réelle de redressement
  • Évaluer si d'autres solutions (mandat ad hoc, conciliation) ne seraient pas plus appropriées
  • Constituer le dossier de demande avec toutes les pièces requises
  • Préparer le dirigeant à l'audience

Cette étape est d'autant plus importante que la frontière entre redressement judiciaire et liquidation judiciaire n'est pas toujours évidente. Un avocat expérimenté saura orienter vers la procédure la plus adaptée.

Étape 2 : Dépôt de la déclaration au greffe du tribunal

Le dirigeant, assisté de son avocat, doit déposer au greffe du tribunal de commerce (ou du tribunal judiciaire pour certaines activités) une déclaration de cessation des paiements accompagnée d'un dossier complet comprenant :

  • Un état de la situation de trésorerie datant de moins de 8 jours
  • Un état des créances et des dettes avec indication des créanciers
  • Un inventaire sommaire des biens de l'entreprise
  • La liste des salariés avec le montant des créances salariales
  • Les derniers comptes annuels
  • Un état actif et passif des sûretés
  • Les coordonnées bancaires

Étape 3 : Audience au tribunal

Suite au dépôt de la déclaration, le tribunal convoque le dirigeant à une audience, généralement dans un délai rapide. Cette audience est un moment crucial où :

  • Le dirigeant explique les causes de la défaillance
  • Le tribunal évalue l'impossibilité de redressement
  • Les perspectives éventuelles de reprise sont examinées
  • Le comportement du dirigeant est apprécié

La présence et l'assistance d'un avocat lors de cette audience sont essentielles pour défendre au mieux les intérêts du dirigeant et de l'entreprise.

Étape 4 : Jugement de liquidation judiciaire

À l'issue de l'audience, le tribunal rend son jugement. Si la liquidation judiciaire est prononcée, le jugement :

  • Fixe la date de cessation des paiements
  • Désigne un liquidateur judiciaire
  • Ordonne la cessation de l'activité (sauf maintien provisoire)
  • Prononce la dissolution de la société
  • Ordonne la publication du jugement

📅 Chronologie type de la procédure

  • J+0 : Consultation avocat et constitution dossier
  • J+1 à J+3 : Dépôt déclaration au greffe
  • J+15 à J+30 : Audience au tribunal
  • J+15 à J+30 : Jugement de liquidation

Le délai impératif de 45 jours

Le Code de commerce impose au dirigeant un délai strict de 45 jours à compter de la date de cessation des paiements pour effectuer sa déclaration au tribunal. Ce délai est d'ordre public et son non-respect expose le dirigeant à de lourdes sanctions.

Conséquences du dépassement du délai

Le dépassement du délai de 45 jours peut entraîner :

  • Action en comblement de passif : le dirigeant peut être condamné à payer personnellement tout ou partie des dettes de l'entreprise
  • Interdiction de gérer : interdiction temporaire ou définitive de diriger une entreprise
  • Faillite personnelle : dans les cas les plus graves
  • Sanctions pénales : pour banqueroute en cas de fraude caractérisée
"À compter de la cessation des paiements, le débiteur doit, dans un délai de quarante-cinq jours, demander l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire."
Article L. 631-4 du Code de commerce

Calcul du délai de 45 jours

Le point de départ du délai est la date effective de cessation des paiements, et non la date à laquelle le dirigeant en prend conscience. Cette subtilité est importante car le tribunal fixera lui-même, dans son jugement, la date de cessation des paiements en fonction des éléments du dossier.

Il est donc crucial d'agir rapidement dès l'apparition des premières difficultés de trésorerie pour éviter tout risque de dépassement du délai légal.

Les effets de la liquidation judiciaire

Le prononcé de la liquidation judiciaire emporte des conséquences importantes et définitives :

  • Cessation de l'activité : arrêt immédiat ou rapide de l'exploitation
  • Dissolution de la société : disparition de la personne morale
  • Licenciement des salariés : fin des contrats de travail
  • Réalisation de l'actif : vente des biens pour payer les créanciers
  • Apurement du passif : règlement des créances selon un ordre de priorité légal

Conclusion : L'importance d'agir dans les délais

Le dépôt de bilan constitue l'ultime recours pour une entreprise dont la situation est irrémédiablement compromise. Bien que cette issue soit difficile pour le dirigeant, elle permet de mettre un terme à une situation intenable et d'éviter l'aggravation du passif.

Le respect scrupuleux du délai de 45 jours est absolument crucial pour protéger le dirigeant contre des sanctions personnelles lourdes. Dès les premiers signes de difficultés insurmontables, il est impératif de consulter un avocat spécialisé.

Maître Gauriat accompagne les dirigeants confrontés à cette situation difficile, en les conseillant sur la meilleure stratégie à adopter et en les assistant tout au long de la procédure de liquidation judiciaire. Une prise en charge rapide et professionnelle permet de traverser cette épreuve dans les meilleures conditions possibles et de préserver au maximum les intérêts personnels du dirigeant.

← Retour aux articles